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Grèce : au centre de toutes les contradictions Officiellement, le chômage dans l’Union Européenne vient de dépasser le chiffre de 10,01%, dans le contexte de crise économique mondial, c’est plus qu’inquiétant. Cette montée du chômage démontre que cette crise qui était annoncée comme purement financière touche l’économie réelle de la manière la plus brutale, c’est-à-dire par la suppression d’emplois. Autrement dit, les décideurs du monde de la finance, qui ont vu leurs établissements bancaires sauvés par le secours massif des Etats, n’hésitent pas à d’une part continuer à s’assurer des profits sans limites tout en étranglant d’autre part une partie des entreprises et transformant des Etats eux-mêmes en débiteurs, voire en les poussant à la faillite. La classe dominante européenne tente de faire payer cette crise non pas aux spéculateurs qui l’ont déclenchée mais aux travailleuses-eurs, les tyrans de la finance qui ont été sauvés par la population travailleuse qui a payé ses impôts désignent comme responsables de leurs méfaits les déficits et la dette publique. Tout un arsenal techno-financier est quotidiennement déversé par les médias pour expliquer au peuple travailleur qu’il a vécu au-dessus de ses moyens ; en réalité, les dominants tentent de récupérer par un accroissement de l’exploitation la catastrophe qu’ils ont déclenchée par la croyance aveugle dans le libre marché capable, selon les néo-libéraux, de s’auto-réguler. Depuis deux ans, la crise du système économique mondial est devenue évidente même dans les pays les plus riches. La bourgeoisie européenne et américaine confrontée aussi à une concurrence de plus en plus rude par les bourgeoisies chinoises, indiennes, russes, brésiliennes et d’autres pays émergents, tente de faire face à la situation en lançant une nouvelle offensive contre l’ensemble des salariés. Le but non avoué est de rendre les salariés européens aussi peu chers que ceux des concurrents. Sur le continent européen, la Grèce est désignée comme l’Etat gaspilleur « social-démocrate » dont le déficit public devrait être ramené à 3% d’ici 2014, sous peine de déclencher un processus de désintégration de l’euro. Cette offensive contre les salariés grecs est menée fondamentalement par les banques allemandes et françaises qui détiennent à elles seules 80% de la dette publique grecque. Les banquiers grecs et le patronat ne participeront en rien à ce plan d’austérité, car la fraude fiscale en Grèce par le biais des sociétés off- shore chypriotes est un jeu financier que les puissants grecs maîtrisent avec art. Sous prétexte que les autres Etats à forte dette publique, les soi-disant PIGS ainsi nommés par l’arrogance habituelle de la presse du nord lorsqu’elle parle des états méditerranéens, pourraient être entraînés dans une spirale stagflationniste et donc affaiblir l’euro, les décideurs européens conseillés par le « social-démocrate » de droite Strauss-Kahn patron du FMI, ont pris une mesure globale d’austérité dans l’ensemble de l’Union Européenne qui fera exploser la pauvreté, la précarisation et le désespoir dans l’ensemble de ces pays. Donc, nous sommes passés en quelques semaines d’une offensive contre les dettes publiques à une attaque généralisée contre l’ensemble des salariés et des retraités. Partout, les gouvernements tentent d’augmenter l’âge de la retraite, de geler les salaires, de modifier les lois sur le travail, de casser les services publics et d’augmenter la TVA, c’est-à-dire d’augmenter l’impôt indirect sur la consommation. Le peuple travailleur grec tente de résister à l’hyperclasse qui gouverne le monde capitaliste par des grèves générales qui, pour le moment, ne stoppent pas l’offensive mais qu’au moins leur permettent de faire savoir aux sociaux-libéraux du PASOC et à leurs alliés qu’il ne se laisseront pas faire sans lutter. Le géant de la zone euro, l’Allemagne, a tapé sur la table non seulement parce qu’ils sont les principaux créanciers de la Grèce mais aussi parce que la droite allemande sait que la crise économique réveille dans le peuple allemand des réflexes autarciques. Ceci n’est pas seulement dû au souvenir des crises mondiales précédentes, mais aussi aux promesses faites en 1989 et non tenues par cette même droite au peuple allemand. Aujourd’hui la droite allemande sait qu’elle gouverne un état très inégalitaire qu’elle a fondé lors de la réunification en 1989, sans rien demander aux autres peuples européens, ce qui la porte à être dans des réactions anticipatrices pro libérales qui visent surtout à se créer un champ d’hégémonie politique. Ceci n’ira pas sans conséquences pour l’ensemble des salariés, car les Etats-Unis d’Obama appliquent les mêmes méthodes d’austérité et de répression pour accroître le taux d’exploitation. L’Espagne, le Portugal, l’Italie, la France sont gouvernés par des dirigeants qui partagent les concepts politico-économiques qui ont provoqués la crise actuelle, c’est-à-dire que les marchés peuvent s’auto-réguler sans intervention étatique et que l’économie ne peut pas fonctionner autrement que si elle est dirigée par les multinationales, les grandes entreprises, donc par les puissants actionnaires spéculateurs. Cette classe dirigeante a mené le monde à cette crise, dans le cynisme le plus total. Face à cela, le peuple travailleur grec comme le peuple travailleur argentin en 2001 se voit dans l’obligation de se battre pour sa survie dans ce vaste marché qu’est devenu le monde. La gauche grecque a une histoire riche de résistance sociale depuis le premier plan d’austérité en 2008 elle n’a cessé de faire des grèves et des manifestations, bien que divisée, elle a organisé quatre grèves générales en peu de temps. Ce qui laisse supposer l’existence d’une certaine unité syndicale du moins sur le rejet des mesures acceptées par le PASOC. Par contre, dès maintenant, la gauche non social-libérale se trouve confrontée au débat suivant : comment contrer cette offensive anti populaire tout en restant dans le cadre de l’euro ? L’Argentine en 2001 vivait dans la parité pesos-dollars ; ce n’est qu’à partir du moment où cette parité a été remise en question, en payant un prix social immense, que la croissance est revenue. La gauche grecque a d’ores et déjà ouvert ce débat, est-il possible de continuer à faire partie d’une monnaie commune qui était supposée être l’émanation d’un ensemble d’Etats solidaires face aux autres économies du monde et qui se révèle si peu solidaire dans la réalité de la crise ?
E.J.C. 1er juin 2010 Copyright © La Lettre Libre Tous droits réservés. La reproduction de ce qui est publié est consentie, à condition de citer la source et l’auteur, et soumise au droit d’auteur. |
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