SUISSE : À BAS L'OLIGARCHIE

Par Enrique Juan Crema

Suisse

Les citoyens suisses sont appelés à voter aux élections fédérales en octobre 2015; la droite extrême centre sa campagne, comme d'habitude, sur des thèmes visant à criminaliser l'immigration, remettre en question le droit d'asile et limiter les coûts des droits sociaux. Elle tente de capitaliser électoralement sa campagne permanente contre les étrangers et l'Union Européenne. Ceci amène une partie des observateurs à émettre l'hypothèse que le seul enjeu de ces élections est de savoir si la représentante du Parti Bourgeois Démocratique (PBD) arrivera à maintenir sa place au Conseil fédéral après les élections ou pas, face à l'assaut de l'UDC. Cette hypothèse est trop réductrice; au-delà des divisions de la droite extrême, il y a un enjeu plus important que la composition des Chambres. C'est de savoir si les futurs élus tenteront dans les années prochaines d'exister face aux pouvoirs réels qui sont plus que jamais concentrés dans les mains d'Economiesuisse et du patronat helvétique, ou bien si les élus continueront à se résigner à être réduits à un rôle d'accompagnants face à la concentration du pouvoir dans les mains des puissances financières.

La droite affirme chaque jour que face à la crise mondiale, la Suisse est un Etat privilégié mieux géré que les autres Etats et donc, elle se présente comme une championne de la gouvernance et par ce discours d'auto-glorification, endort le peuple travailleur suisse face aux problèmes qui restent sans solutions. Ces problèmes sont d'ordres divers : apparition de la pauvreté dans de larges couches de la population, crise de l'emploi, augmentation des personnes dépendant de l'assistance sociale ou des revenus d'insertion, crise du logement, scandale des prix des caisses-maladie, routes devenues impraticables, inégalités sociales croissantes ainsi qu'une étrange sensation d'insécurité alimentée jour après jour par des médias tenus de plus en plus par des «bobos» de droite. C'est une pure illusion dans le contexte européen actuel de laisser croire au peuple travailleur qu'il suffit de bloquer l'entrée d'immigrés en Suisse, de rester à l'écart de l'Union Européenne ou d'élire un parlement un peu plus centriste pour que les problèmes énoncés puissent être abordés au moins dans les quatre prochaines années.

Il faut un sursaut de la gauche suisse

La social-démocratie, qu'elle soit socialiste ou verte, s'est engluée dans sa collaboration avec la droite et, perdant toute son autonomie dans les exécutifs, n'apparaît plus comme une alternative capable de résoudre les problèmes face à la droite. L'attaque frontale contre les femmes, représentée par l'augmentation de l'âge de la retraite pour les femmes et la suppression des rentes de veuves pour les femmes sans enfant ou dont les enfants ont grandis, sans aucun souci de justice sociale, démontre que la direction du Parti Socialiste, n'a plus aucune capacité ni volonté de résistance face aux plans d'austérité et de concentration du capital de la droite helvétique.

Dans ce contexte, la gauche de la gauche se doit d'affronter dans tous les domaines de la vie politique, syndicale et associative, la dominance idéologique de l'oligarchie. C'est un lent travail pédagogique qui doit être fait pour démonter les mécanismes d'exploitation et d'oppression en place. Car, alors que la guerre aux portes de l'Europe apparaît dans la vie de chacun par les images tragiques des réfugiés syriens, aucun débat géostratégique sérieux n'apparaît dans la classe politique suisse pour les années prochaines. Le peuple travailleur suisse, comme celui d'Europe, devra trouver par lui-même les moyens de préserver les droits sociaux et leurs libertés. Dans ce contexte, face à la réaction ultra-capitaliste mondiale, on ne peut qu'appeler les citoyennes et les citoyens à voter pour les listes de la gauche de la gauche, partout où elles sont présentes au niveau national, car une nouvelle victoire de l'UDC, des néo-libéraux et des socio-libéraux aggravera dans les années prochaines les conditions de vie quotidienne de la population laborieuse. Au-delà du vote d'octobre 2015, la gauche de la gauche se doit au plus vite de regrouper ses forces pour construire un programme politique qui, partant de la défense immédiate des droits du peuple travailleur, ouvre des réflexions débouchant sur des projets clairs pour résoudre les problèmes des gens. Mais pour que cela ne reste pas du domaine de l'incantation, il est nécessaire que les futurs élus de la gauche de la gauche incarnent réellement, au jour le jour, les idées qu'ils souhaitent développer. Il faut que les nouvelles générations de gauche renouent avec un travail associatif, syndical, militant, qui implique forcément de sortir du train-train quotidien et de cesser de croire que la simple communication sur les réseaux sociaux peut remplacer des structures et des organisations militantes. La droite peut se permettre de monter des partis fictifs en abreuvant de millions les agences de publicité et en organisant des congrès bidons qui apparaissent en direct à la télévision. La gauche ne peut opposer, face à la télé-démocratie, que le courage, l'intelligence et l'esprit de sacrifice porté par l'espoir d'un monde meilleur.

 

21 septembre 2015

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15 mars 2015

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